Le burn out semble une problématique récente de santé au travail, mais ce concept n'est pas nouveau, il est apparu dans le milieu des années 1970. Comment définir le burn out, cet épuisement professionnel extrême qui ne fait l’objet d’aucun diagnostic médical officiel?
Il s'agit d'une brutale rupture psychique et physique, d’une dépression. Ce phénomène est devenu révélateur : le rapport au travail a évolué, comme les méthodes de management et l'organisation des entreprises. (4) La prolifération de méthodes de management iniques, la culture du changement permanent et le culte de la performance en entreprise entraîne un sentiment de perte de valeurs et de sens selon les psychiatres et sociologues. Au-delà du burn-out, il est question d’un lien trop étroit entre travail et construction de l’identité. (4) Facteurs psychosociaux L’épuisement professionnel est une conséquence du stress au travail, et on retrouve parmi les causes des facteurs de stress :
On trouve également des facteurs liés à la personnalité de l’individu : Certains traits de personnalité sont mentionnés par des auteurs : présence d’un névrotisme élevé, difficultés à gérer le stress, instabilité émotionnelle, tendance au perfectionnisme, tendance à l’hyperactivité (surinvestissement au travail) et à l’addiction au travail (workaholisme) (1) Le burn-out peut s’apparenter à un trouble de l’adaptation, ou à un état de stress post-traumatique, ou à un état dépressif. Selon certains auteurs, le burn-out pourrait se définir par la seule dimension d’épuisement émotionnel. (1) Le burn out en chiffres La définition du burn-out étant assez imprécise, on dispose de très peu de données épidémiologiques.
I.2 Symptômes Les travaux de Christine Maslach ont servi de référence pour définir le syndrome d'épuisement professionnel lequel est une suite à des situations de stress professionnel chronique dans lesquelles l’engagement est majeur. Ce syndrome se caractérise par 3 dimensions :
Ainsi, le burn-out résulterait à la fois de facteurs personnels (pour 40%) et de facteurs organisationnels (pour 60%), c’est à dire à la fois des facteurs liés à l’individu et des facteurs liés à l’environnement. (1) De nombreuses professions demandent un investissement personnel et affectif important. Les salariés exerçant ces métiers peuvent être concernés par le risque de burnout quand ils en arrivent à ressentir un écart trop important entre leurs attentes, la représentation qu’ils ont de leur métier (portée par des valeurs et des règles) et la réalité du travail. Cette situation, qui les épuise et les vide ”émotionnellement“, les conduit à remettre en cause leur investissement initial. (2) La symptomatologie du burn out est de fait assez complexe, peu spécifique et peut évoluer vers la dépression ou l’anxiété. (2) I.3 Burn out et Dépression Les études montrent que la dépression et le burn out ne se recouvrent que partiellement. Même si le burn out peut évoluer vers la dépression, ses manifestations sont dans un premier temps limitées à la sphère professionnelle. Il est le signe d’un processus de dégradation du rapport subjectif au travail alors que la dépression est un état atteignant les différentes sphères de la vie de la personne. (3) I.4 DSM V et CIM 10 La notion de burn-out est aujourd’hui source de confusion parce qu’elle ne figure pas dans les classifications internationales :
Le concept de ”souffrance au travail” recouvre l’ensemble des impacts négatifs des environnements de travail sur l’individu. Ce terme est surtout utilisé en France et n’a pas vraiment de traduction dans les publications anglo-saxonnes. En santé mentale, l’Organisation Mondiale de la Santé établit 3 niveaux différents : le bien-être psychologique, la détresse psychologique, les troubles mentaux. Du reste, le rapport de l’Académie nationale de médecine mentionne que toute fatigue n’est pas pathologique, qu’une détresse psychologique peut être imputable à des évènements de vie négatifs. Cette définition du burn-out explique les manifestations affectant le système cardio-vasculaire (risque coronarien), la fonction sommeil, l’appareil musculo-squelettique, (douleurs chroniques), la sphère affective (humeur dépressive, mauvaise estime de soi, anhédonie), les relations interpersonnelles (détachement, indifférence, irritabilité).” II. Exemples ”J’étais une machine de guerre”, dit une cadre bancaire, submergée par un emploi du temps infernal et des missions en contradiction avec son éthique personnelle. ”J’étais devenue une technicienne”, regrette une assistante sociale, accablée par les tâches administrative. (4) L’exposition au risque de burn out peut concerner les professions d’aide, de soins, de l’enseignement… des professions où la relation à l’autre est au centre de l’activité et constitue un enjeu, parfois vital, pour les bénéficiaires de cette relation (les usagers, les patients, les clients, …). Le burn out peut également concerner d’autres secteurs d’activité susceptibles de mobiliser et d’engager les personnes sur des valeurs professionnelles très prégnantes. Cas d’une infirmière hospitalière : ”Ma profession d'infirmière, je l'ai choisie, je l'ai voulue… Mais aujourd'hui, j’ai l'impression d'être vidée. Je dois aller d’un lit à l’autre. J’ai l’impression de n’avoir jamais le temps de faire correctement mon travail. Je supporte de moins en moins les plaintes, les angoisses des patients. Je me dis qu'être infirmière n'est pas aussi valorisant, gratifiant que cela…” (2) Un cadre dans une banque : ”depuis 3 mois, je suis en arrêt pour burn out, dépression, trouble anxieux généralisé, phobies sociales, auto dévalorisation. Le psychiatre m'a mis en arrêt avec un formulaire maladie professionnelle, et envisage un ALD (Affection de longue durée)”. ”J'en suis à ne même plus pouvoir faire mes courses ou a compter des choses simples. Aujourd’hui je n’arrive même plus travailler à un guichet”. ”Je suis chef de projet avec un statut de cadre et j'ai 30 ans, je travaille depuis 6 ans pour le même employeur. J’ai connu un stress particulièrement intense en l'espace d'une année, projets compliqués et gros manquement du prestataire, j'en alertais ma direction mais intervention trop tardive de mes supérieurs. Sur la même période a lieu une nouvelle direction et beaucoup de problèmes d'organisation du travail et d'agression verbale ponctuelle envers moi. Depuis 2 mois, j’ai eu 2 arrêts de travail presque consécutifs dans le même mois de quasiment 3 semaines pour cause de dépression, actuellement soignée. Des problèmes de fatigue persistante ont poussé mon médecin à me faire faire une prise de sang, qui a révélé un problème de thyroïde. L’endocrinologue a déclaré que le facteur déclencheur est un stress intense dans mon cas”. III. Gestion des emotions – l’Intelligence Emotionnelle Psychologie Cognitive L’adjectif cognitif se rapport à la cognition, c'est-à-dire aux grandes fonctions de l’esprit : perception, langage, mémoire, raisonnement, décision, mouvement … Nous avons vue que les ressources émotionnelles jouent un grand role dans le burn out. Les phénomènes émotionnels font appel à de nombreux comportements et processus cognitifs, comme l’évaluation de la situation émotionnelle, la régulation des réponses émotionnelles, l’identification des sentiments émotionnels et les décisions sur les conduites à adopter. L'émotion peut se définir comme un état de conscience accompagné de modifications physiologiques (trembler de peur, sauter de joie ..). Les théories de l’évaluation cognitive considèrent les émotions comme des réactions adaptatives à l'évaluation cognitive d'une situation : à la fois la signification de la situation est analysée (nouveauté, valence, degré de contrôle) et les conséquences sont anticipées et mesurées par rapport aux intérêts du sujet. Selon ces théories, l’évaluation cognitive du stimulus émotionnel et son impact sur l’individu détermine la nature de cette émotion. L'évaluation dépendrait donc de facteurs situationnels, culturels et de personnalité. Dans les théories cognitives, la psychopathologie est le résultat d’erreurs dans le processus de traitement d’information (sensations) à cause de schémas cognitifs inappropriés. Un schéma cognitif est un ensemble de représentations (implicites) des connaissances (affectifs, cognitifs, moteur) sur soi-même, les autres et le monde (concepts et expériences, les liens entre eux). Les représentations sont implicites, et la fonction des schémas est de diriger les processus de traitement d’information. En situation de stress, l’individu dresse l’inventaire des ressources personnelles (contrôle perçu) et sociales (soutien social perçu) dont il dispose pour faire face à l’événement auquel il est confronté. Le contrôle perçu est protecteur pour la santé, un sentiment de perte de contrôle s’avère nocif. Le soutien social perçu désigne le sentiment sur la possibilité d’être aidée, protégée. Gestion des Emotions Nous retenons la définition de l’intelligence émotionnelle trait en tant que concept unique comprenant des aptitudes et compétences intra- et interpersonnelles se combinant pour déterminer le comportement humain. L’intelligence émotionnelle est vue comme un ensemble d’aptitudes cognitives et de traits de personnalité. C’est ainsi que nous prenons en compte l’instabilité émotionnelle ou névrosisme comme une dimension de la personnalité qui conduit la personne à bien souvent percevoir, construire et ressentir la réalité et les évenements comme menaçants, pénibles et problématiques. (3) Le Questionnaire d’Intelligence Emotionnelle Trait Le Trait Emotional Intelligence Questionnaire (TEIQue) est basé sur un modèle qui conceptualise l’intelligence émotionnelle en termes de personnalité. L'intérêt de l’instrument est de fournir une information complémentaire à celle obtenue via les tests de QI et les tests classiques de personnalité. Quelques questions à titre d’exemple : Je suis généralement capable de dominer les autres Généralement, je ne tiens pas compte des émotions des autres J’ai tendance à m’impliquer dans des choses dont je voudrais ensuite pouvoir me sortir Les autres m’admirent pour être quelqu’un de détendu Je trouve toujours des moyens pour exprimer ma tendresse aux autres quand je le veux J’ai tendance à changer fréquemment d’avis J’éprouve en général des difficultés à m’exprimer clairement IV. Actions Prévention Pour prévenir l’épuisement professionnel, il est recommandé de veiller à ce que l’organisation du travail et les contraintes qu’elle génère ne surchargent pas les salariés et ne les mettent pas en porte-à-faux vis-à-vis des règles et des valeurs de leur métier. Il convient également de permettre le travail en équipe ou encore de favoriser le soutien social. Et de manière plus générale, il est recommandé de mettre en place une démarche de prévention collective des Risques psychosociaux. Repérer les situations de burnout au niveau individuel Au niveau individuel, l’employeur, l’encadrement, les acteurs de la prévention au sein de l’entreprise, le service de santé au travail doivent être vigilants à un ensemble de signaux pouvant laisser penser qu’un salarié est peut-être en situation de burn out :
Un changement dans l’attitude du salarié, un repli sur soi, un désengagement inhabituel sont autant de signaux qui doivent interpeller l’entourage professionnel. Au niveau collectif, les indicateurs de dépistage des risques psychosociaux pourront être examinés. Le repérage du burnout peut également se faire par questionnaires. Mettre en place des mesures de prévention collective Des mesures de prévention adaptées doivent être recherchées et mises en place. Elles ont pour objectif de faire diminuer les exigences professionnelles qui pèsent sur les salariés et d’augmenter les ressources à leur disposition. Exemples de mesures de prévention collective de l’épuisement professionnel :
Prendre en charge les personnes atteintes du burnout Quand une ou plusieurs personnes sont victimes d’épuisement, l’encadrement peut leur proposer un entretien permettant de faire le point sur leurs difficultés. Les raisons de leur état en lien avec le travail doivent être recherchées. Elles peuvent parallèlement contacter le médecin du travail. Celui-ci estimera la nécessité d’une orientation vers une prise en charge spécialisée et appréciera l’opportunité d’un aménagement de poste ou d’une redéfinition des objectifs et des moyens à leur disposition. Le service de santé au travail peut également aider l’entreprise à repérer les facteurs de risques professionnels en lien avec les cas de burn out portés à sa connaissance. (2) Les malades du burn out sont sensés contribuer à leur guérison grâce à la finesse de leur analyse du processus du burn out, fruit d’un patient effort de reconstruction. V. Conclusion Nous proposons que la formation à la prévention et l’accompagnement d’un burn out soit incluse dans la formation de tous les cadres, managers et agents de maîtrise. Ceci dans l’intérêt de la personne concernée en difficulté, cadre ou non, ce qui peut, dans certains cas, mener à la dépression et éventuellement au suicide. Et, également, dans l’intérêt de l’institution et de l’entreprise afin de tendre vers un fonctionnement optimal de ses services et départements. Références
Addendum : https://www.cairn.info/revue-humanisme-et-entreprise-2008-4-page-81.htm
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